Catalogue expo Mauvaise Graines II: Les images de Céline Guichard / texte Alain François 2016

Les images de Céline Guichard

Texte écrit Par Alain François en mars 2016 pour le catalogue de l’exposition “Mauvaises Graines II”, du 10 Mai au 16 Juin 2016, Espace Topographie de l’art / Paris

Les images de Céline Guichard provoquent rarement l’indifférence. Elle n’a pourtant jamais l’intention de choquer, mais une intention farouche, oui, de ne pas réprimer les images qui naissent du jeu complexe de la pratique quotidienne du dessin, de ses recherches visuelles et de toutes les réminiscences qui la traversent.

Si ces images provoquent des réactions, c’est qu’elles sont souvent perçues comme étranges, bizarres, inattendues. Et l’inattendu est insensé, au sens propre, car n’a de sens pour nous que ce que nous re-connaissons. L’inquiétude de Freud devant l’étrangeté vient de cette part d’inattendu de certaines productions mentales, d’une de ces expressions libres qui s’opposent à toute répression. D’où, pour le regardeur perturbé par ce mélange de réminiscence et d’étrangeté, une soudaine agnosie visuelle et un désir bien compréhensible de rattacher son travail à des références parfois arbitraires. La pulsion interprétative est si forte chez nous tous, si irrépressible, que la lecture va s’accrocher aux moindres indices reconnaissables, aussi léger soit-il, en évacuant soigneusement l’inattendu et donc l’illisible pour se perdre dans le malentendu. C’est notre manière de croire comprendre tout ce qui nous excède ou tout ce qui nous est exogène.

Pourtant, inutile de céder à l’inquiétude, car même l’inattendu vient de quelque part. Les images de Céline Guichard naissent simplement. Elle structure sa production en séries de 10 à 50 dessins qui trouvent leur identité spécifique par un changement de contraintes très pragmatiques : le choix d’un support nouveau, d’un format, d’un outil. Et ces contraintes objectives lui donnent le cadre d’apparition et l’esthétique de cette série nouvelle.

Son thème majeur est l’hybridation. Elle dessine presque systématiquement des personnages qui déclinent à peu près toutes les possibilités d’hybridation : mâle/femelle, animal/humain, végétal/animal, humain/minéral, etc. Lorsque cette hybridation n’est pas avérée, le personnage porte prothèses ou accessoires étranges, mais accessoires ou prothèses qui risquent toujours de devenir organe. C’est cette combinatoire très personnelle qui fait naître ce bestiaire ésotérique que Céline Guichard semble sortir de la plus obscure des ombres de sa psyché.

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